La Revue du Liban
No 3823, du 15 au 22 Décembre 2001

Joseph Matar… un poète à l’âme de soleil
par Sonia Nigolian

Nous pouvons lire sur le carton d’invitation de Joseph Matar qui présente ses oeuvres à l’hôtel de ville de Jounieh, ces quelques lignes signées Jean De Lalande: “Peintre solaire et passionné de lumière, de couleurs et de vie, mais aussi de la grandeur de l’évocation de l’artiste qui donne de nouvelles formes au réel et aux êtres, Joseph Matar en a conçu toute une mission: Faire ressortir aux yeux les beautés et la force des choses, telles celles d’un arbre vivant, d’une baie enchanteresse, d’une brassée de fleurs, d’un groupe humain chaudement recueilli… Ce sont des oeuvres d’amour, de vigeur, de poésie et de liberté…”

Est- il vraiment besoin de présenter cet artiste qui nous offre ce véritable hymne à la vie? Est-il besoin de présenter au grand public cette oeuvre aux formes souvent fuyantes, voilées d’une espèce de tulle sans âges qui se fondent dans l’espace pour ne conserver que l’essence d’elles-mêmes? Sans doute est-ce pour cette raison que la peinture de Matar joue sur les contours? Les repères flottent et la lumière, cette lumière si particulière qui noie les choses, les paysages, les êtres, fait rayonner l’ensemble de chaque composition, nous restituant des espaces picturaux à la fois mouvants et rassurants.

Partant de quelques couleurs aux résonances fortes et bien calculées, l’artiste fait jouer chacune de ces nuances de cette lumière irisée, pour élaborer des sensations qu’un profane croirait oculaires… Mais ces perceptions sont en réalité de celles qui dépassent largement l’oeil, lequel ne devient qu’un récepteur-transmetteur, pour toucher au plus profond de lui même, celui qui regarde le tableau.

Une composition de Matar est avant tout une composition d’ambiance. Ce qui domine dans son travail ce sont ces vibrations colorées qui subsistent en vous, enchåssées qu’elles sont dans des formes auxquelles elles donnent du volume. Une ambiance qui exacerbe des silences comblés, attise les mystères et présage à d’attirantes solitudes.

La peinture de Joseph Matar s’avère être aussi tout un état où l’on s’abandonne à la contemplation de ces paysages, de ces villages serrés dans leur mutisme.

Des univers qui semblent assoupis somnolant dans l’attente de l’imminent retour des ses hôtes….

En somme, des étendues, des lieux qui unissent dans l’harmonie homme et nature.

Et l’émotion est au rendez-vous de cette manifestation où toujours Joseph Matar, se servant de la couleur passée au tamis de ses sentiments, livre le silence des choses.

Ce poète de la nature et de l’humain, ce poète à l’âme de soleil, en véritable scénographe, soucieux du jeu d’ombre et de lumière, aura réussi encore une fois à peupler des espaces authentiques, peignant tout à la fois avec sensualité et ascétisme.

Que dire de plus, qui va être de trop?

Comme il est difficile de parler quand l’émotion vous étreint.

La couleur est toujours passée au tamis des sentiments de l’artiste.

Maisons désertées comme assoupies semblant attendre le retour de ses hôtes…

Qui sont ces femmes saisies dans cette étranges lumière?