Une question de culture et de formation
qui se traduit dans l’œuvre de Joseph Matar
Aspects de l’art des cultures non occidentales
Par
Joanna Bassil
Baccalauréat en histoire de l’art
Université du Québec à Montréal
Mardi 11 avril 2000
1- Fiche technique:
Auteur : Joseph Matar né en 1935, actif à partir de 1950
Titre: Bougainvillées
Date: 1997
Matériaux : Huile sur toile
Dimensions: 81 x 100 cm
Collection : Atelier de l’artiste
2- Introduction:
Qu’elle soit occidentale, africaine, asiatique ou autre, l’œuvre d’art est une forme de médiation. Elle nous transmet une vision et une pensée précise d’un artiste. Le Moyen-Orient et plus spécifiquement le Liban a connu beaucoup de difficulté durant les dernières décennies. Malgré la guerre, ce pays a pu résister aux souffrances. Son peuple s’est tenu debout et ses artistes ont continué à pratiquer leur métier. Joseph Matar est une des figures dominantes du milieu de l’art au Liban. Il s’exprime autant par le dessin et la couleur que par la poésie et la musique. Au fil des années, Matar a suivi l’évolution historique de son pays. Il a représenté les moments de la guerre et en même temps il a opté pour la peinture des groupes humains, des paysages et des maisons libanaises. Tout ceci a pour but de laisser l’espoir et la joie dans ses toiles.
Bougainvillées est une toile qui fait partie du thème de la maison libanaise. Suite à une présentation du peintre, je ferai une description de l’œuvre et du thème tout en situant la toile dans la production de l’artiste. Joseph Matar a une manière de peindre qui est propre à lui. En même temps, il est influencé, dans ses représentations de paysages, par les artistes de la fin du XIXième siècle européen. Cet emprunt aux occidentaux est dû à deux faits qui ont marqué sa production. Dans un premier lieu, il a suivi ses études en Europe et par la suite, il vit dans un milieu de culture orientale qui est jumelée à l’occidentale. C’est ce que je vais essayer de démontrer dans la rédaction du texte qui suit, tout en situant le peintre dans son espace-temps. Matar est un peintre libanais qui travaille à la manière des artistes occidentaux modernes.
3- Présentation de l’artiste:
3.1 Sa vie – sa formation:
Né au Liban en 1935, Joseph Matar a reçu ses premières études en art à l’école des grands Maîtres Libanais. Où il a eu la chance de rencontrer Omar Onsi, Georges Corm, Rachid Wehbé et bien d’autres grandes personnalités du monde artistique. Par la suite, durant les années 1960 et 1970, il voyagera beaucoup en Europe. Ceci est dans le but d’approfondir ses études et d’enrichir sa formation artistique. Il obtient un professorat en art de l’Université de Madrid. Deux ans plus tard, vers 1963, il part vers la France et où il prend son doctorat en art de l’Université Paris VII. Enfin il s’en va à Rome où il aura la chance de connaître et de voir de près les œuvres des grands Maîtres italiens. Sans oublier de noter qu’au fil de ses études, Matar a détenu des bourses gouvernementales de ces pays. Ainsi, à travers ses voyages et ses études à l’étranger, il a accumulé des références européennes. Les œuvres des artistes de la seconde moitié du XIXième siècle, ont été une sorte de repère dans sa peinture de paysage.
3.2- Son travail:
Dans la production de Matar, on retrouve une diversité de thèmes ainsi qu’une multitude de techniques utilisées. Chacune de ses compositions est unique et se trouve être différente des autres. Il peint avec de l’huile sur toile, de la gouache et à l’aquarelle. Sa façon de travailler est pratiquement singulière, mais en même temps il se réfère dans sa peinture de paysage à l’art occidental. On peut, en quelque sorte, attribuer ses œuvres, qui représentent la nature, à la seconde moitié du XIXième siècle et au début du XXième siècle. Cet artiste, dans ses toiles peintes à l’huile, travaille avec des touches rapides et serrées et par endroit, elles peuvent être larges ou bien petites et fines. Alors sa palette chromatique est composée à partir des tâches. Par ailleurs, ses œuvres puisent leurs références dans l’art cézannien et aussi dans celui des fauves. Souvent on remarque dans ses compositions une application des bleus en juxtaposition aux orangers. Un rapport impressionniste et post-impressionniste est aussi manifesté dans le traitement de ses paysages.
Par contre, les thèmes que Matar privilégie sont très caractéristiques de sa pensée, de son milieu et de sa culture. Souvent son œuvre est le produit de la situation sociale du peuple libanais et de l’époque. L’objectif visé, dans la majorité de ses compositions, est d’atteindre le «Sacré», même à travers la peinture des nus (1). Cet artiste est, par sa production artistique et par ses écrits, un témoin de l’actualité et des événements de son pays. Durant les durs moments de la guerre, il a continué à produire et il a opté pour la représentation des affligés et des sans abris. De même il a peint la destruction du pays et les manifestations du peuple libanais. Parmi ses toiles on retrouve aussi une représentation du «cosmos». Matar affirme, dans un entretien de 1994 (2), que ce sujet envahit son âme, son esprit et sa pensée.
En parallèle à ses thèmes, l’artiste manifeste un très grand intérêt pour la peinture de la nature. Ce thème occupe une place assez vaste dans sa production. La plupart de ses paysages révèlent la nature et la maison, que les journalistes et les critiques d’art locaux qualifient de typiquement libanaises. Avec le début des bombardements, en 1975, l’artiste a arrêté de peindre des huiles sur toile en plein air et il a commencé à travailler d’après sa mémoire. Ainsi la totalité de ses compositions de paysages se trouvent être des toiles d’atelier. Matar a opté de traduire à travers ce thème la maison ancienne, afin qu’elle reste dans la mémoire des Libanais et dans leur conscience. Cette maison qui, avec l’explosion et l’éclatement urbain au Liban, a commencé à disparaître de la scène architecturale, sinon à perdre de sa valeur. Le peintre résume son pays à travers ce genre de représentations. Il traduit des endroits nostalgiques, traditionnels et en même temps il communique le patrimoine libanais.
La totalité de ses toiles sont des poèmes d’amour et de raison. Elles expirent un optimisme très fort, une joie insaisissable et un bonheur incomparable. Elles sont le manifeste de ce paradis qui a été perdu avec les débuts de la guerre. En même temps, elles traduisent une grande «admiration pour le créé». On peut les qualifier de «Sacré». Joseph Matar est présent dans ses compositions comme un dur rocher de la terre libanaise. Il est si solide et si actuel qu’il arrive à voir et à nous montrer la réalité de son pays. Avec son geste de peindre et l’amour qu’il met dans sa peinture, ce peintre-poète rend sa composition plus agréable, il lui attribue un caractère vital et humain. Matar atteint, par excellence, dans la totalité de ses œuvres, la poésie et le senti.
3.3- Espace-temps:
Le milieu artistique au Liban s’élargit de jour en jour. Les artistes deviennent de plus en plus nombreux. Leur production est très large et elle ne se limite pas à une seule culture libanaise mais elle est multiculturelle. Joseph Matar, tout comme ses confrères, traduit dans ses œuvres plus qu’une culture. Ainsi on peut le qualifier d’un post-moderne par la fusion des deux cultures, celle dite orientale et celle de l’occidentale. Par ailleurs, sa peinture est de tradition moderniste. Bien que ses représentations de paysages empruntent des normes à l’art européen, ce peintre se trouve être de son temps par le mélange de sa double formation libanaise et occidentale. En même temps sa façon de voir l’art et de le transmettre, révèle une mentalité eurasiatique. Joseph Matar a une large réputation aussi bien au Liban qu’à l’étranger. Durant la guerre et par la suite, il a eu plusieurs fois la chance de voyager pour des expositions. Il a exposé dans les pays arabes, sur les territoires américains et en Europe à plusieurs reprises. Ceci lui a permis d’avoir une reconnaissance plus vaste et de faire connaître son pays à travers ses œuvres. Matar expose aussi dans son pays et reçoit souvent des grandes commandes.
4-Description:
4.1- Description de l’œuvre:
Bougainvillées (fig.1) est une œuvre d’atelier exécutée en 1997. Elle a déjà été exposée, en 1998, dans la galerie Cave de France qui est située à Beyrouth. Jusqu’à ce jour, elle ne fait partie d’aucune collection. Elle appartient toujours à l’artiste. Cette œuvre traduit de façon assez réaliste le paysage rural libanais. Une représentation de la nature et de la maison libanaise forment le sujet. La relation de l’observateur avec cette composition se met en rapport direct, de face à face. Une immobilité du corps permet une observation plus précise de la totalité de l’œuvre. Le spectateur n’est pas contraint de se déplacer ou de tourner autour de la toile. Cette composition est formée de trois plans (schéma S1).
Un premier plan (A) où se trouve l’espace vide qui nous permet d’accéder à l’intérieur de la toile en incluant la petite masse bleue qui est peinte à droite. Un moyen plan (B) est représenté par la grande maison qui occupe une partie importante du paysage. Enfin un troisième et dernier plan (C) est traduit par le bâtiment qui se trouve être noyé dans la masse de verdure.
Devant cette peinture, notre regard est, tout de suite, attiré par l’architecture orientale. Occupant le plein centre de la composition, l’immense demeure assure une base et une stabilité dans la toile, elle l’assoit. La verdure ainsi que la végétation, qui sont peintes dans la composition, dirigent notre regard dans toutesles directions. À travers le traitement, on aperçoit que la composition est chargée de motifs géométriques et floraux. Il y a un entassement qui se traduit. Dans sa totalité, la toile se trouve être condensée d’éléments. Par contre, on constate que l’artiste a laissé un passage à droite. Ainsi, le spectateur peut accéder dans le paysage par l’intermédiaire de l’espace vide et de la petite ruelle. Une rigidité s’affirme dans la composition. Elle se traduit par l’architecture des maisons. Tandis que toutes les autres formes coulent.
Bougainvillées, est caractérisée par une texture plastique non lisse. Elle est référentielle par endroit. Elle nous réfère à la texture du béton dans les maisons. De même à la texture soyeuse de l’amandier fleuri situé à l’extrême droite dans la composition. Les coups de pinceau sont très présents dans le traitement des composantes de la toile. Ils nous révèlent le geste de peindre chez l’artiste. Matar a donné à ses coups de pinceau une allure rythmique. L’œil du spectateur se promène constamment dans tous les sens de l’œuvre. Tout un aspect floral et végétal prend place dans cette peinture. L’artiste nous propose des couleurs en aplat. Par leurs juxtapositions et leurs superpositions les unes sur les autres, on obtient la reproduction de l’espace. Dans cette composition, la profondeur est traduite par étagement. L’artiste a diminué les écarts entre les plans. De cette façon la toile prend en quelque sorte un aspect d’unité. L’espace est très restreint entre les éléments. La composition est très condensée. Ce peintre se trouve être très moderne par sa palette, de même par le traitement de l’arrière-fond en aplat et qui est hachuré assez largement.
Matar ne définit pas les objets par leurs contours mais bien par leurs couleurs. La touche dans cette composition se trouve être vibrante. Il n’y a aucune limite entre les composantes. Les couleurs s’entremêlent et se mélangent les unes aux autres. Les tons des éléments se fusionnent. Des riches teintes vertes, bleues et blanches s’étendent sur la surface de l’œuvre. Des touches rapides de rouges, d’oranges, de jaunes ocres et de roses viennent en quelque sorte rythmer l’œuvre. La vivacité énorme, qui se traduit dans la facture, ainsi que la brutalité d’exécution caractérisent cette toile. L’artiste a empâté fortement sa toile. La touche est étalée dans tous les sens. Tout ceci crée un mouvement dans la composition.
Les feuillages sont représentés par des masses simples. Elles varient dans les tons verdâtres. La source lumineuse vient de l’extérieur de la toile et elle est traduite par des variations de nuances dans les couleurs. Matar n’a pas utilisé le gris pour représenter le clair-obscur. Il a évoqué l’effet d’ombre par le bleu et celui de la lumière par la vibration du blanc et du jaune. Il reproduit l’éclairage naturel par sa palette chromatique. Ainsi la couleur de la lumière est mélangée à celles des demeures et de la verdure. Le peintre n’a pas dégagé le caractère capital des arbres par le dessin mais bien par la couleur. Dans l’arrière plan il a peint le feuillage de façon à ce qu’il cache les squelettes des arbres. Alors on constate qu’il traduit les formes par les couleurs.
4.2- Description du thème:
Le thème, traité dans cette composition, ne reflète aucun culte en particulier ni une croyance précise. Il n’appartient pas à une nation spécifique. C’est un sujet très connu et que les artistes peignent depuis des siècles. Le paysage faisait partie de la hiérarchie des genres. Au début on le situait en bas de l’échelle, aujourd’hui il est devenu un sujet accepté, on ne le différencie pas des autres thèmes. D’ailleurs avec le mouvement de la modernité et de la post-modernité, on ne qualifie plus le sujet d’un bon ou d’un mauvais goût. L’artiste est devenu complètement libre de traiter ce qu’il voyait le plus représentatif de sa pensée. Ainsi, Joseph Matar comme d’autres artistes traduit la nature de son pays à travers ce thème.
Comme son titre l’indique, Bougainvillées représente ce type de plantes qui grimpent. Ce sont des arbrisseaux sarmenteux qui s’élèvent du sol et s’accrochent aux faîtes du mur. Ils serpentent et parcourent les deux étages de la demeure qui est représentée en plein milieu de la composition. De même, l’artiste a peint des pergolas naturelles sur lesquelles s’étendent des vignes et des grimpantes. Cet aménagement de paysage qualifie, de façon typique, l’ornementation végétale et florale de la maison libanaise. De même sur la terrasse du deuxième étage on trouve une frise formée de pots de fleurs. Par la suite, Matar a représenté l’architecture orientale. Cette maison, à deux étages, est en pierre avec des fenêtres à volets rouges qui longent les murs. L’architecture avec des arcades ogivales dans les demeures est caractéristique du monde arabe.
Ce paysage est typique de la campagne libanaise. Dans cette toile, on retrouve deux demeures qui sont envahies par la grandeur de la montagne et par les arbres. Une ruelle nous conduit vers l’amandier fleuri. Elle nous amène à l’intérieur du paysage. C’est l’endroit idéal pour vivre au calme et sans le bruit de la ville. Ainsi, Joseph Matar a voulu représenter le Liban qui était caractérisé par sa verdure. L’artiste laisse dans la mémoire des Libanais la «Suisse de L’orient». C’est de cette façon qu’on nommait ce pays, aujourd’hui déchiré par la guerre est devenu, par endroit, comme un désert de bâtiments. L’explosion urbaine a gâché toutes les belles demeures traditionnelles, et la guerre a brûlé toute la verdure qui caractérisait cette patrie. Les paysages de Matar transmettent et transcendent le Liban. «Ainsi, le pays, dans ses toiles, est représenté par l’arbre, la pierre, le rocher, et la maison. Le tout se traduit par la formation d’un tout entre la couleur et l’œil» (3). C’est de cette façon que le peintre fait revivre dans la mémoire des Libanais leur patrimoine.
Matar connaît la nature et il l’apprivoise, dans chacune de ses peintures de paysages il nous transmet un des secrets de la nature. Ainsi lorsqu’on regarde les toits en briques rouges, les arcades, les pergolas naturelles on ressent que la demeure forme un tout avec la nature. Dans ses toiles on retrouve la maison traditionnelle et la maison du rêve qu’on perd au fur et à mesure que l’éclatement urbain progresse. Dans le paysage l’artiste cherche la sainteté et le sacré (4). Pour lui, « l’art est conditionné par un tout, et c’est ce tout qui le réabsorbe après. Ceci dit, l’art n’est pas un folklore de mondanités qu’on remarque actuellement. C’est un besoin qui suppose beaucoup d’amour, de sacrifice et de volonté. L’art, c’est l’avoir et l’être, conclut Matar, le bagage que possède l’artiste dans son imagination créatrice et qui sera son œuvre, détachée de lui, un corps nouveau et indépendant » (5).
5-L’influence des autres peintres:
Joseph Matar a une manière de peindre qui est propre à lui. En même temps il emprunte des techniques de la peinture de la fin du XIXième siècle et du début du XXième siècle. Il emprunte aux impressionnistes, à Cézanne et aux avant-gardistes. Sa manière de peindre est très particulière car elle se réfère à plusieurs mouvements et tendances. Ses études et le milieu dans lequel il vit définissent ses influences. Ainsi dans cette section de mon travail je vais essayer de traduire ses empruntes tout en analysant sa formation et son entourage.
5.1- Le milieu?
Le postmodernisme a pris place dans le monde entier depuis de nombreuses années. Il se manifeste dans tous les domaines artistiques et dans une grande majorité des pays. Au Moyen-Orient, malgré l’intérêt du peuple porté sur la postmodernité, l’évolution de leurs arts plastiques démontre que les plus vives polémiques qui tournent autour de la modernité sont loin d’être clos (6). En effet, l’expression artistique qui est propre à la tradition islamique se trouve être remplacée par la conception de l’art occidental. La création de nouvelles infrastructures, tels que les académies, les expositions officielles dans des salons et les musées, a contribué à faire introduire l’art occidental et académique au Moyen-Orient.
Au Liban, contrairement au pays avoisinants, on se trouve complètement ouvert à l’Occident, par le seul fait que les chrétiens avaient, auparavant, une dominance importante dans le pays. De même le rapport aux nouveaux modèles culturels issus de l’Occident allait être conditionné par un fait déterminant: Le Grand-Liban, créé par la puissance mandataire française en 1920. La capitale du pays, Beyrouth, jusqu’en 1975, était considérée comme une ville dynamique et elle avait des activités d’échanges avec l’Europe. Ainsi il y eut une forte francisation des élites libanaises et celle-ci causera une influence capitale sur la culture du pays, on cherchait à créer une culture arabe moderne (7). Jusqu’à la guerre civile de 1975, les Libanais vivaient avec une culture où l’influence occidentale était fortement présente. Malgré les bombardements et la guerre, le peuple du Liban est resté ouvert et en contact avec l’Occident. Depuis des décennies et jusqu’aujourd’hui deux cultures règnent au Liban. Une culture arabe se trouve être fortement marquée par les évolutions culturelles en Occident.
Avec l’évolution du milieu artistique dans le Moyen-Orient, au début du XXième siècle, on s’est trouvé dans un dilemme par rapport à la peinture libanaise. On ne savait plus comment la qualifiait, est-ce qu’elle est universelle, orientale ou arabe ?(8) La culture européenne était très répandue dans le pays, de même il y eut l’inauguration d’une école d’art en 1937, tout ceci a amené l’influence des peintres occidentaux. Ainsi des photographes étrangers et des peintres de l’Europe venaient s’installer à Beyrouth, ce qui va causer une grande réputation de l’art occidental. Par contre, cette influence ne fut pas le facteur essentiel dans l’évolution de l’art libanais. Les artistes du pays avaient une soif d’en apprendre plus, alors ils entreprenaient des voyages aux Etats-Unis et un peu partout dans les grandes capitales artistiques de l’Europe.
Ainsi Joseph Matar fut un des peintres libanais qui vit dans ce milieu où deux cultures règnent. Celle de l’occidentale qui est fortement jumelée à l’orientale. Cet artiste ne va pas seulement se limiter à la formation qui lui est offerte dans son pays mais, il va aussi aller dans les capitales artistiques européennes pour enrichir sa culture et sa formation. Avec son séjour en France il va avoir sa nationalité française. Comme la plupart du peuple libanais, Matar se caractérise par sa double nationalité. À la différence des autres, il va pouvoir de cette manière la manifester dans sa production artistique. D’où on remarque cet aspect occidental dans ses toiles surtout celles des paysages. De même, on trouve au Liban une liberté d’expression. Tandis que dans les autres pays arabes on interdisait certaines formes d’expressions, il y avait une censure, tout était contrôlé avant d’être diffuser. C’est pour cela on voyait un grand nombre de producteur qui venaient vivre à Beyrouth.
5.2-Ses études?
Depuis le début de ses études, Joseph Matar a été formé sous cette double culture. À l’école des grands Maîtres Libanais, un de ses professeurs les plus marquants c’est Omar Onsi. Cet artiste fait partie de la première génération des peintres libanais. Ils pratiquaient un art académique et ils s’inspiraient des modèles parisiens. D’ailleurs une certaine référence (9) indique que le peintre Onsi était un grand ami de Georges Cyr, peintre français qui était venu s’installer au Liban. De plus Onsi était caractérisé et connu pour sa peinture de la nature libanaise. Ses paysages rendent toute l’ambiance de la montagne libanaise. Au début des années 1930, il est parti vivre à Paris et où il profitera de peindre à la manière des occidentaux. De là on remarque l’influence de ce professeur sur son étudiant. Ainsi Matar a pu, depuis sa jeunesse, accumulé toutes les tendances européennes.
Par la suite les voyages de Joseph Matar en Espagne, en France et en Italie, ont eu une très grande importance dans sa production. Le fait de se déplacer dans les musées européens et d’observer les œuvres des anciens grands Maîtres occidentaux, suffit à accumuler des tendances dans sa pratique artistique. Cette observation des chefs d’œuvres qui a participé à sa formation, témoigne de la tendance de son art. Ses œuvres révèlent son intérêt qui est porté à la peinture de la fin du XIXième siècle. La formation, qu’il a eu, est la grande cause de cet emprunt. Sa toile, intitulée Bougainvillées, explique son influence. Elle est figurative et moderne. Par contre elle est postmoderne par la double culture qui est reflétée dans son dessin. Joseph Matar interprète les autres peintres à sa façon. Il travaille de manière à faire miroiter sa personnalité et son intérêt à l’art occidental. Sa formation l’a beaucoup aidé à réaliser cet art qui se trouve être unique par cette double tendance.
6-Conclusion:
Pour terminer sur tout ce propos, Joseph Matar s’est formé sous ces conditions. Il est le témoin de la culture occidentale dans un pays arabe. Cet artiste dans sa toile intitulée Bougainvillées évoque le paysage rural du Liban. Elle est construite avec des règles modernistes. Son œuvre traduit deux tendances. Elle manifeste un sujet libanais et une peinture occidentale. Elle séduit ou bien elle surprend, son œuvre fait revivre le patrimoine libanais. Matar a une manière de peindre qui est, en même temps, parallèle à celle des peintres modernes et elle est particulière à lui. Aucun artiste ne peut copier littéralement un autre artiste. Il est toujours unique, car il y a sa personnalité et ce «Moi» qui se trouvent être traduits dans son œuvre. Ainsi, Joseph Matar a manifesté de l’intérêt à l’art occidental, tout en transmettant un message qui est propre à son identité. Il est un polyglotte, il interprète plusieurs langages artistiques et à sa manière. Il est très moderne comme palette. La vraie aventure de l’art moderne se situe dans son imagination et sa sensibilité.
Bibliographie
Périodiques:
- CHAKRA, Claude Abi, «Le peintre libanais Joseph Matar», Alaab, (juin 1995), s. p.
- CHAKRA, Claude Abi, «Joseph Matar présente le paysage libanais», Le travail, (février 1987), s. p.
- D., A., «Joseph Matar travaille à partir de sa propre vision», La semaine arabe, (juin 1996), s. p.
- DAHER, Joseph Abi, «Le peintre de la maison et de la nature libanaises», Al Anwar, (juin 1979), s. p.
- DAHER, Joseph Abi, «Matar raconte l’être et la terre», Al Anwar, (janvier 1999), s. p.
- DELALANDE, Jean, «Joseph Matar…une œuvre qui appelle à la participation», Revue du Liban, (avril1995), s. p.
- DELALANDE, Jean, «Joseph Matar plein de songes, sensible et poète», Revue du Liban, (août 1996), s. p.
- HAMAMGI, Nayla, «Joseph Matar au centre culturel hispanique», Le Réveil, (mars 1981), s. p.
- KARAM, Donna, «Le peintre Joseph Matar»,L’appel de la patrie(Nidaou El Watan),( juin 1996),s. p.
- MISKAWI, William, «Le paysage libanais avec Joseph Matar», Cedars Wings, (avril/mai 1999), s. p.
- SALAMEH, Nohad, «Le pouvoir idéographique de la couleur», Le Réveil, (mai 1980), s. p.
- SALAMEH, Nohad, «Joseph Matar, un peintre polyglotte», Le Réveil, (mai 1977), s. p.
Site Web:
MATAR, William, «L’atelier de Joseph Matar», site web consulté en mars 2000, https://www.lebanonart.com/
Livre:
NAEF, Sylvia, À la recherche d’une modernité arabe : l’évolution des arts plastiques en Egypte, au Liban et en Irak, édition Slatkine, Genève, (Collection Arabiyya n° 13), 1996, 450 p.
Ref:
1- Boutros, Girmani, «Galeries d’huiles – Groupes humains», dans: William, Matar,L’atelier de Joseph Matar, site web consulté en mars 2000, https://www.lebanonart.com
2- A., D., «Joseph Matar travaille à partir de sa propre vision», La semaine arabe, (juin 1996), s. p.
3- Joseph Abi, Daher, «Le peintre de la maison et de la nature libanaises», Al Anwar, (juin 1979), s. p.
4- Claude Abi, Chakra, «Joseph Matar présente le paysage libanais», Le travail, (février 1987), s. p.
5- Nayla, Hamamgi, «Joseph Matar au centre culturel hispanique», Le Réveil, (mars 1981), s. p.
6- Sylvia, Naef, À la recherche d’une modernité arabe : l’évolution des arts plastiques en Egypte, au Liban et en Irak, Slatkine, Genève, 1996, quatrième de couverture.
7- Ibid., p.121
8- Ibid., p. 111
9- Ibid., p.161