L’avion de la 25ème Heure

Trois minutes à peine après l’envol, scène apocalyptique
Une explosion à bord, une boule de feu dans le ciel électrique
Une déflagration énorme et des éclats parmi les éléments
Une lumière éblouissante dans un orage au firmament
Il était pleine nuit, l’appareil venait de décoller
Emportant à son bord vers un ciel sombre, de nuage voilé
Des passagers paisibles, installés, confiants en des projets lointains
Ne se doutant du tout du sort inscrit sur leur destin
Heureux de s’en aller pour la rencontre des leurs ou gérer un devoir
Ils avaient dit adieu aux amis et parents et au revoir.
Mais le diable était là dans la tempête et dans les nuages
Planifiant pour un horrible et un sanglant carnage
Pour supprimer des êtres chers, des êtres innocents
Et zébrer le grand bleu de la couleur du sang
Un orage grondait dans le ciel et sur terre
Une tempête, des éclairs et des rageuses vagues déferlaient sur la mer
Un froid glacial en plus un vent dévastateur
Une averse incessante noyait tout l’horizon de sa hideur
Il eut suffi une fraction de seconde dans la voûte trompeuse
Ils allaient vers le sud et vers l’Abyssinie et sa terre radieuse
Encore un peu, ils auraient traversé ce couloir de la mort
Et revu les étoiles, au ciel, resplendissantes et sans effort
Mais là, ce fut le drame, terrible catastrophe et combien douloureuse
Une boule de feu, qui tombe verticale sur cette mer houleuse
Et ce fut le silence, le long silence de l’attente
Et déjà sur les ondes les rapides nouvelles attristantes
Sont tombés sur les cœurs, le monde entier fut consterné
Les recherches de nuit sont pénibles sous ce ciel orageux et la mer déchainée
N’ont laissé nul espoir de survivants, des débris, quelques corps ont été repêché
Une foule d’amis, de parents, de braves gens s’est dépêchée
Sur la côte et dans les hôpitaux et à l’aéroport
Espérant un miracle, mais hélas triste sort
Chagrins, larmes et pleurs, tristesse, affolement
Des scènes déchirantes, du délire à l’effondrement
Devant Dieu, l’Eternel, devant la mort, tous les êtres
Sont égaux, riches ou pauvres, ni mesures, ni paramètres :
Les richissimes seigneurs près de leurs pauvres servantes
Auront livré ensemble leurs âmes dans la carlingue volante.
Dans la même eau glaciale, ils ont été ensevelis
Sans fleurs, ni Chrysanthèmes, ni marguerites, œillets ou lys
L’amour, l’émotion, le chagrin ou l’allégresse
Phénomènes humains comme l’énergie ou la paresse
En cette Ethiopie héroïque, malgré toute sa pauvreté
Etoile du ‘Négus’ en cette Afrique des mystères
Nostalgique Reine de Saba qui vers Salomon le sage légendaire
Se dirigea en faste à Jérusalem espérant porter en ses entrailles
Le roi Sauveur du monde qu’elle aurait éduqué à sa taille
Funérailles sans les corps, défunts atroces douleurs
En Ethiopie, au Liban, comme en France et ailleurs
Nous sommes tous émus, bouleversés devant la mort affreuse
Espérant que les recherches pénibles actives et sérieuses
Pourront remettre à chaque famille son disparu chéri
Afin de l’inhumer dans les traditions de sa patrie
Des familles entières ont été en cette catastrophe décimées
Père, enfant, épouse. Le frère venant son frère réclamer
Ou sa sœur, sa cousine, son oncle, amis et parents
Péris ensembles dans le même ciel et les mêmes courants
Les mères qui se lamentent, les épouses angoissées dans l’attente
Des images très tristes des douleurs émouvantes
Le Liban entier, pleure ses enfants méconnaissables
Et aussi nous pleurons les Ethiopiens nos amis si serviables
L’être humain est une flamme flamboyante vivante
Les sentiments l’aiguisent et la rendent plus brûlante
Fils de l’humanité, passagers de ce malheureux avion
Je vous pleure sans vous connaître, je pleure vraiment
Comme les mouettes, les goélands, les oiseaux de la mer
Qui volent au-dessus des nuages et dans leurs cris austères
Ce n’est pas la faim seule qui les range
Mais un besoin d’aider la foule qui sur la plage se range
Regardant désespérément l’étendue bleue et profonde
La tragédie se joue sous les vagues qui grondent
De l’armée, les élites de nos héroïques plongeurs
Se sont livres courageusement et avec ardeur
Durant plus de deux semaines épiant cherchant
Au centimètre: sables, rochers, et gouffres géants
repêchant les corps des victimes innombrables
dont les parents sur la plage s’impatientent infatigables
Au fond de l’eau un triste champ de sépultures invisible
Et sur la plage des endeuillés à la volonté inflexible
Attendent, le malheur nous unit, mais l’espoir
Reprendra le dessus au paradis dans l’éternelle gloire
Car ceux qui sont partis ont été recueillis là-haut
C’est nous autres ici bas qui pleurons, que ce soit comme il faut
Car la vie continue et le travail et toute chose à faire
Avec courage, il faut reprendre vie et foncer au contraire.

Joseph Matar
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